La Fondation de l'Abbaye
L'Abbaye a été fondée par Geoffroy Martel alors Comte de Vendome et son épouse Agnès de Bourgogne.
En construction à partir de 1035, elle a été dédiée le 31 mai 1040, un mois avant que Geoffroy devienne Comte d'Anjou à la mort de son père Foulques III Nerra. |
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Une légende du XIIème siècle décrit la scène de la création de l'Abbaye.
Un dimanche matin, le Comte de Vendome, Geoffroy Martel se mit avec son épouse à la fenetre qui éclairait leur chambre du coté de l'aquilon. Le chateau se trouvait sur la crete de la montagne où s'élève aujourd'hui l'Eglise St Georges. Le bourg, avec ses nombreux habitants, était au pied de la montagne et exposé au vent du nord. Hors du bourg, vers l'orient, s'étendaient de vastes prairies au milieu desquelles s'ouvrait une large fontaine où presque tous les habitants venaient puiser. Or, comme le Comte et son épouse, qui s'appelait Agnès, considèraient l'étendue du ciel et la multitude des étoiles et parlaient entre eux de diverses choses, tous deux virent soudain une étoile très longue, en forme de lance, tomber dans la fontaine. Ils n'étaient pas encore revenus de leur étonnement, qu'une seconde étoile tomba, puis une troisième redoublant leur stupeur et leur admiration. En hate, le Comte, prenant des vetements plus dignes, descendit de la montagne avec son épouse, et, dans l'Eglise St Martin qui se trouvait proche de la fontaine fit chanter une messe en l'honneur de la Sainte Trinité. Il raconta en meme temps ce qu'il avait vu à des Eveques, des Abbés et autres personnages respectables, leur demandant quelle conduite tenir
en l'occurence. Or tous ceux qu'il consulta, dans un meme esprit et les memes termes, lui donnèrent le meme conseil, de batir au milieu des prés une Eglise en l'honneur de la Sainte Trinité, d'établir l'autel sur la fontaine meme et de réunir là des serviteurs de Dieu qui le loueraient nuit et jour.
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Geoffroy fit placer cette Abbaye directement sous la dépendance du Pape. Cette exemption fut acceptée par Thierry, Eveque de Chartres et confirmée en 1056 par Henri I Roi de France. C'est en 1063, trois ans seulement après la formation définitive du Collège des Cardinaux que le Pape accorda aux Abbés de Vendome le privilège de devenir Cardinaux de droit du fait de leur élection et leur assurait la possession de l'église Sainte Prisce de Rome. Ce résultat fut obtenu avec l'aide d'Agnès de Poitiers, Impératrice d'Allemagne et fille d'Agnès femme de Geoffroy Martel. C'est Hildebrand (le futur Grégoire VII) qui fit attribuer le Cardinalat à l'Abbaye de Vendome, alors sous la tutelle de l'Abbé Oderic.
Très bien dotée dès sa fondation, l'Abbaye de la Trinité se trouva rapidement posseder un domaine très important, ainsi elle possèda l'ile d'Oléron.
Bien que la Trinité n'ait jamais fait partie de la congrégation de Cluny, elle a été créée à son origine avec des moines clunisiens venus de l' Abbaye de Marmoutier, près de Tours. Il avait été décidé que si l'on ne trouvait pas au sein de l'Abbaye de la Trinité de moine digne de porter la crosse d'Abbé, on en demanderait un à Cluny ou à Marmoutier.
A l'époque de l'Abbé Geoffroy (cf ci dessous), l'Abbaye compte une centaine de moines et ses biens se répartissent sur les Evêchés de Chartres, du Mans et de Saintes.
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L'Abbatiale de la Trinité de Vendôme
de Isabelle Isnard -- Presses Universitaires de Rennes - ISBN: 2753503702
L'abbatiale gothique de la Trinité de Vendôme n'avait jusqu'à présent jamais fait l'objet d'une monographie approfondie. Sa construction s'inscrit dans l'histoire d'un monastère fondé au XIe siècle et dont la Révolution sonna le glas : elle ne pouvait donc pas être étudiée sans chercher à définir le poids séculaire d'une histoire prestigieuse qui en explique la remarquable ambition. C'est ainsi qu'ont été analysés le contexte de la fondation par le comte d'Anjou et sa femme Agnès, les liens privilégiés avec la Papauté, et l'importance des reliques, notamment la Sainte Larme, dans le développement de l'établissement jusqu'à la fin du Moyen Age. L'étude des bâtiments monastiques et des usages liturgiques permet de cerner le cadre de vie de la communauté monastique : celle de l'abbatiale romane et de son clocher permet de démontrer toute l'importance de ces monuments dans la conception de l'église gothique. Isabelle lsnard, se fondant sur l'étude détaillée du plan de l'abbatiale gothique, de son élévation et de sa structure, de sa modénature, de son décor et des procédés de construction qui y furent employés, mais aussi de ses vitraux, propose une nouvelle chronologie, relative et absolue, de la construction entre 1271 et 1508 environ.
Sur ces bases renouvelées, l'auteur brosse un tableau inédit, circonstancié et précis du développement de l'architecture dans un territoire qui s'étend de la vallée moyenne de la Loire à la Normandie, du Maine à l'Orléanais. Les liens tissés en un réseau complexe entre les différents chantiers ouverts dans cette région de la fin du XIIIe au début du XVIe siècle sont analysés. En définitive, l'abbatiale apparaît comme un témoignage majeur de l'architecture rayonnante de la fin du XIIIe siècle et de l'architecture flamboyante vers 1500.
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Visite de l'Abbaye
Un peu d'Architecture
L'Eglise d'origine (XIème siècle) était de style Roman, il en subsiste le transept et ses quatre piliers. Elle est assez profondément remaniée à partir de la fin du XIIIème siècle. Les travaux dureront près de deux cent ans, interrompus par la Guerre de Cent Ans.
Le ClocherIl a été construit au XIIème siècle et s'éleve à 80 mètres de hauteur. Toute sa construction, en particulier ses fondations sur un sol mouvant (marais), témoigne de l'ingéniosité des architectes de cette époque. On y retrouve l'influence de la Tour Charlemagne (XIème siècle) de l'Abbaye Saint Martin de Tours. A l'origine, il était relié à l'église du XIème siècle par un porche dont les fondations ont été retrouvées. Un second clocher avait sans doute été prévu, mais il n'a pu être construit.
Quelques définitions d'Architecture Religieuse
Le Clocher |
Monographie Abbé Plat 1934 |
La Nef
La photo de gauche montre une vue intérieure de la nef.
La reconstruction de l'église a commencé en 1306 par le chevet et s'est poursuivie par la nef, les travaux pour finaliser celle-ci ont duré près de deux siècles. Le portail (cf façade) a été achevé en 1506.
La partie réalisée au XIVème siècle est peut-être la plus intéressante. Elle comprend le chevet, la voûte de la croisée et les deux dernières travées de la nef qui semblent avoir été achevées vers 1370. Les cinquième et sixième travées ont été élevées à la fin de la Guerre de Cent Ans. Enfin la construction des premières travées s'échelonne de 1485 à 1506.
Le Transept
La photo de droite montre l'extrémité nord du Transept, qui est de style Roman. On constate l'opposition de style avec le reste de la nef qui est gothique.
La Façade
Elle attire le regard à partir de la Place Saint Martin et au soleil couchant on a l'impression d'un flamboiement.
Elle est de style Gothique flamboyant et a été achevée en 1506 par l'architecte Jean de Beauce.
Les Vitraux
L'église conserve plusieurs vitraux remarquables.
D'abord celui de la Vierge de Vendome qui a été réalisé au XIIème siècle (cf photo ci contre). Dans le Choeur les vitraux remontent au XIIIème siècle avec également un vitrail du XIVème où le Comte Geoffroy Martel remet le Reliquaire de la Sainte Larme à l'Abbé de la Trinité.
La Sainte Larme
Un don important du comte Geoffroy Martel est celui de la
Sainte Larme. Vainqueur des Sarrazins, il l'avait obtenu de l'Empereur de Constantinople. C'est une Larme versée par le Christ sur le tombeau de Lazare et qui avait été placée dans une bulle de cristal. La Sainte Larme fit de l'Abbaye de Vendome un centre de pélerinage important du XIème siècle jusqu'à la fin du XVIIIème siècle.
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L'Abside et le Chevet de l'église
L'Abside et le Chevet ont été construits au XIVème siècle.
La vue de l'église coté Est dans le prolongement d'un bras du Loir est particulièrement belle (photo à gauche).
La photo de droite présente l'Abside et le Croisillon Nord.
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La Salle Capitulaire: les fresques
L'abbaye comporte une belle salle capitulaire (la salle des chanoines du chapitre de l'abbaye) qui a été remaniée au XIVème siècle.
Cette salle possède des fresques romanes du XIIème siècle. L'une d'elles est particulièrement remarquable:
La pêche miraculeuse (cf photo ci-dessus).
L'Abbaye de la Trinité à la fin du Moyen-Age
La gravure ci-dessus donne une vue d'ensemble de l'Abbaye de la Trinité de Vendôme à la fin du Moyen-Age. En bas les jardins ont été utilisés pour la construction de batiments militaires (Régiment des 20èmes Chasseurs stationés à Vendôme jusqu'en 1914). Le côté Est qui donne vers l'extérieur de la ville est protègé par des remparts, il comporte trois Tours. Le côté Ouest est constitué par les
Greniers de l'Abbaye, dont certains sont encore bien visibles. Le
Cloître est également bien mis en évidence au centre de la gravure, demême que la
Résidence de l'Abbé, sur la droite à mi-hauteur.
Les batiments annexes de l'Abbaye
Ces batiments annexes à l'Abbaye constituaient l'environnement de la vie des moines.
1- Le Cloitre
Les travées du cloître suivent l'évolution de celles de la nef. On le voit d'ailleurs très bien sur la gravure au-dessus.
2- Les Greniers
3- La résidence de L'Abbé
(maintenant le Presbytère)
Ce logis a été construit au début du XVIème siècle par l'abbé Louis de Crevant.
L'Abbé Geoffroy de Vendome
Geoffroy a été élu Abbé le 21 Aout 1093 et consacré par l'Eveque Yves de Chartres le 24 suivant. Il succèdait à Bernon qui avait résigné sa charge à cause de son age et de son état de santé.
En 1094,
Geoffroi Abbé de Vendome aida (avec de l'argent) le pape
Urbain II à l'emporter sur l'antipape Guibert et en 1095 Geoffroy est présent au Concile de Clermont.
Lorsqu'Urbain II vint precher la Croisade en France, il séjourna onze jours à Vendome en février 1098. En 1101-1102 l'Abbé Geoffroy essaie de s'opposer (en vain) à l'élection de Renaud comme Eveque d'Angers. En meme temps il se bat à Oléron et Vendome pour préserver les biens et les droits de son Abbaye. En 1107 il accueille le Pape Pascal II dans l'Abbaye de Vendome, Geoffroy va ensuite participer au Concile de Troyes puis se rend à Cluny. Par la suite il se préoccupe surtout des affaires de l'Eglise, il est actif dans la querelle des Investitures et reproche au Pape Pascal II sa faiblesse devant l'Empereur Henri V. Ce n'est que vers 1120 qu'il se consacre plus aux reflexions spirituelles et théologiques. Il assiste au Concile de Reims en Octobre 1131, il meurt l'année suivante le 26 mars 1132 au Monastère de l'Evière à Angers.
Cet Abbé Geoffroy fut un grand personnage de son temps par son role politique et religieux mais aussi par les Lettres et Ecrits qu'il a laissés.
Son Abbatiat fut la grande époque de l'Abbaye de la Trinité.
Ci dessus, miniature du XIIème siècle représentant l'Abbé Geoffroy de Vendome
Les écrits de Geoffroy de Vendome ont été édités en 1610 par un Jésuite Jacques Sirmond puis un peu plus tard par l'Abbé Migne dans sa Patrologie Latine. Geneviève Giordanengo vient récemment (1996) de publier une édition plus complète s'appuyant sur un Manuscrit de la Bibliothèque Vaticane (Fonds de la Reine Christine) et sur celui de la Bibliothèque Municipale du Mans.
Geoffroy est né vers 1070, il est issu de la famille des Seigneurs de Craon et le fils d'Henri de Nevers Seigneur du Lion d'Angers. Henri était l'un des quatre fils de Robert le Bourguignon Seigneur de Craon, et à ce titre il est apparenté aux Comtes de Vendome issus des Bouchards et de la Maison d'Anjou.
En effet Robert de Nevers (dit le Bourguignon) est le neveu de
Bodo, le mari d'Adèle de Vendome (fille de Foulques Nerra et d'Elizabeth de Vendome et héritière du Comté). Robert est le fils de Renaud I Comte de Nevers et d'Adèle de France (la fille du Roi de France Hugues Capet). Bodo est le frère de Renaud I de Nevers.
Robert I de Craon a épousé Hedwige de Sablé (fille de Geoffroy le Vieux Seigneur de Sablé), ils ont quatre fils et une fille:
- Geoffroy mort sans enfant,
- Renaud II Seigneur de Craon,
- Robert II Seigneur de Sablé,
- Henri Seigneur du Lion d'Angers, père de l'Abbé Geoffroy,
- Béatrice (Bourguignonne) épouse de Renaud I Seigneur de Chateau-Gontier (d'où sont issus les
Seigneurs de Chateaurenault)
On mesure ainsi les ancetres et la parenté prestigieuse de l'Abbé Geoffroy, qui descend de Hugues Capet mais aussi des Carolingiens par la mère de Renaud I de Nevers, Mathilde de Bourgogne femme de Landri de Nevers Sénéchal de France.
Il a d'ailleurs un poids d'autant plus important à Vendome que le Comté vient de passer, en 1085 par mariage, à la Maison de Preuilly qui n'a pas l'aura des parents de Geoffroy.
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